“Le commerce du sage est sans valeur et il perfectionne ; le commerce de l'homme de peu est agréable, et il corrompt.” (Confucius)

Néanmoins, Rokugan ne vivrait pas sans son commerce.

Une chose peu connue est que toute l’organisation du commerce à Rokugan a été édictée par Lady Doji, kami de la Grue. Et son fondement vient de l’organisation même de la société Rokugani.

Dans le principe, un samouraï n’a pas besoin de commercer, et ceci pour deux raisons :

• Dans la province de son seigneur, un samouraï pourrait ordonner à un heimin de lui donner ou de fabriquer ce qu’il souhaite. L’heimin doit s’exécuter.
• Toute requête fondée par un samouraï doit être satisfaite par son seigneur, qu’il soit dans sa province comme en voyage à l’extérieur. C’est le seigneur qui doit donner au samouraï ce qui est utile à sa tâche.

A partir de ces points, un samouraï n’a théoriquement pas à faire cette chose abjecte qu’est le commerce. Le samouraï n’a besoin que de quoi boire, se nourrir, et le nécessaire pour accomplir sa mission (vêtements, armes, armure…). Chercher à obtenir des éléments du quotidien par son propre argent en commerçant sous-entend que son seigneur n’est pas capable de subvenir aux besoins de ses vassaux. C’est extrêmement déshonorant pour le seigneur comme pour le vassal.

Dans la théorie pure, le samouraï va demander ce dont il a besoin à son seigneur, qui va s’arranger pour qu’il l’obtienne. Aucune facture n’est payée aussitôt en boutique : l’étiquette veut que l’on ne parle pas d’argent et les heimins le savent. La facture sera envoyée plus tard, chez le seigneur ou au domaine du samouraï.

Les seigneurs peuvent évidemment refuser une requête de leur samouraï s’ils la jugent inappropriée pour leur mission. Certains seigneurs, moins à cheval sur l’étiquette, donnent directement l’argent à leur samouraï. Pas directement de la main à la main, mais en lui indiquant une somme qui lui est allouée : les heimins se chargeront de payer à sa place. Cette somme est donc à considérer comme une rente, plus qu’un salaire.

De ce fait, un samouraï ne se balade généralement pas avec de l’argent sur lui. N’ayant pas l’habitude de l’argent, ils ne l’apprennent pas et donc ne le connaissent pas.

Une conséquence directe est que les samouraïs ne connaissent généralement pas la valeur des choses. Evidemment, les seigneurs propriétaires terriens ont tous, avec l’expérience, une connaissance acquise avec le temps. Dans une famille vivant dans la tradition Rokugani classique, l’un des conjoints est sédentaire et est souvent plus à même de savoir le prix des choses, car c’est lui qui gère la maison et ses serviteurs (souvent la femme, sauf différence de statut évidente ou exceptions familiales, telles que la famille Otaku de la Licorne, ou Moshi du Mille-pattes).

Comme les denrées et donc l’argent sont indispensables pour la société, ce sont les heimins qui généralement vendent, achètent, gèrent l’argent et le manipulent pour le compte des samouraïs.

Néanmoins, certains clans et familles considèrent qu’il est plus important d’avoir des notions de commerce plutôt que de laisser cela qu’aux heimins. Les plus notables sont la famille Ide de la Licorne (Iuchi de façon plus discrète, et les autres familles de la Licorne l’acceptent volontiers), la famille Yasuki du Crabe et le clan de la Mante en général.

Au sein de leur famille, on enseigne la valeur des choses, et même s’ils utilisent le système de commerce Rokugani classique, ils savent de quoi ils parlent et n’hésiteront pas à intervenir au besoin.

Le Koku est l’unité de base de l’argent à Rokugan. Il est divisé en bu et en zeni par le calcul suivant :

1 Koku = 5 bu = 50 zenis

Le koku est censé représenter la valeur de la quantité de riz mangée par une personne en un an. Cette valeur n’est pas fixe : même si une personne doit manger la même quantité de riz en théorie d’une année sur l’autre, il n’en est pas de même de la quantité de riz qui est récoltée par an. Les années où la récolte est très bonne, le koku est donc dévalué, alors qu’il vaut plus cher lorsque les récoltes sont mauvaises, car le riz est plus rare.

Ce mécanisme fait que les prix peuvent beaucoup changer d’une année sur l’autre.

Chaque année, les magistrats de clan doivent collecter les récoltes et en faire l’inventaire, et transmettre le résultat à l’administration de l’Empereur. Les magistrats d’Emeraude veillent au contrôle à postériori de ces inventaires au besoin. L’Empereur alloue alors une somme en Koku qu’il va verser à chaque clan selon ses récoltes. Le clan de la Grue est par conséquent le plus riche en grande partie car ses récoltes sont les plus abondantes.

L’Empereur pondère également ses envois en Koku afin qu’aucun clan ne se retrouve réellement en pénurie d’argent si ses récoltes sont particulièrement mauvaises.

L’argent en koku sert ensuite à l’achat des denrées nécessaires (dont le riz manquant pour nourrir sa propre population pour certains clans, comme le clan du Crabe par exemple). Il sert également pour le commerce de tout le reste (armures, armes, matières de constructions, consommables et produits de luxe, art, rentes et salaires…)

Les heimins gèrent l’argent. Ils sont ceux qui cultivent, extraient, produisent et vendent. L’artisanat et l’art samouraï est limité à des points précis et à souvent une vocation soit artistique, soit d’excellence.

Cela ne veut pas dire que les samouraïs sont totalement extérieurs au commerce : Le Samouraï est un “bienfaiteur” – mécénat et sponsoring. Les heimins ont besoin de la protection des samouraïs. Etant la caste armée de Rokugan (seuls les samouraïs et personnes autorisées par eux ont le droit de porter une arme), ils les protègent des vols, des bandits, des rapts, des embargos…

Derrière chaque heimin qui pratique le commerce se trouve donc un samouraï qui le protège. Généralement, les heimins les appellent les “bienfaiteurs”.

Souvent, il s’agit du seigneur gouverneur en place. Mais il ne s’agit souvent pas du seul. Si les gouverneurs veulent bien sûr la main mise sur l’argent qui circule chez eux, ils ne s’y intéressent pas toujours ou laissent leurs bonnes relations s’installer sur leurs terres. Par conséquent, les quartiers marchands ont souvent des bannières multiples et colorées : les heimins affichent toujours, plus ou moins discrètement, leur allégeance : on trouve les mons des familles bienfaitrices.

L’heimin reçoit donc une somme d’argent pour la fabrication des biens et/ou la tenue de sa boutique. Les boutiques sont également souvent protégées par un rônin ou un ashigaru qui est lui-même payé par le bienfaiteur. Avoir un samouraï affecté à la protection d’une boutique est souvent la preuve que celle-ci est extrêmement réputée ou cruciale pour le bienfaiteur.

Il arrive parfois, comme cité plus haut, que le samouraï soit lui-même le créateur de ce qu’il vend. Néanmoins, même s’il est présent dans sa boutique, il n’est pas le vendeur (à moins d’être un Yasuki, un Ide ou un Mante…). Un heimin s’occupe des actes commerciaux.

Afin de faciliter les échanges de denrées, les heimins sont organisés. Néanmoins, lorsque des situations de cartels se mettent en place, il y a souvent des tractations de samouraïs derrière. Les clans, familles, gouverneurs et autres s’arrangent généralement au niveau macro pour les échanges de biens.

L’Empereur également veille au contrôle de certains commerces : les armes gaijins sont interdites, la vente d’opium est contrôlée pour un usage strictement médical, le commerce de jade est tout bonnement interdit…

En conclusion : même si la bienséance fait que l’on ne parle pas d’argent, ne croyez pas que les samouraïs n’y sont pour rien. Beaucoup bâtissent leur richesse par ce biais. En outre, il n’est pas si inconvenant de déclarer ouvertement être un “grand bienfaiteur”… même si l’un des principes du bushido, et donc du samouraï honorable, est… l’humilité.